Jean-foutres ou forfaiture ?
QUESTION : Les élus de la République Française et les responsables politiques se préoccupent-ils du sort des citoyens ou sont-ils les taupes des grands groupes industriels et des maîtres financiers d’une économie sauvage mondialisée imposée, dont la finalité consiste à asservir les employés ?
Il suffit de se poser la question pour comprendre l’impunité dont bénéficient les responsables des catastrophes industrielles et pourquoi l’argent des contribuables sert à aider les grandes entreprises et les banques après leurs erreurs, au lieu de se concentrer sur l’amélioration de la vie des citoyens et en particulier de celle des plus démunis.
Le Gouvernement et le « social ».
Devant le problème de la souffrance au travail, le Gouvernement a botté en touche, préférant renvoyer les travailleurs concernés chez le psychologue plutôt que de demander à l’entreprise de modifier des pratiques injustes et inhumaines causes de graves traumatismes. Pendant que le corps social consulte sur les risques psychologiques, aucun responsable politique ne s’interroge sur les pratiques de production dans l’entreprise. Il est ainsi plus facile de comprendre pourquoi un ministre socialiste du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du « Dialogue social » préfère orienter son action sur le contrôle des employés en arrêt de travail pour raison médicale et sur les sanctions concernant les chômeurs qui ne trouvent pas d’emploi, au lieu de se préoccuper des distorsions de concurrence dans la zone euro par l’emploi de salariés sous payés et hors réglementation nationale. La nomination d’un banquier d’affaire, associé gérant de la banque Rothschild au poste de ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique souligne les priorités d’un Gouvernement socialiste qui a renié les valeurs sociales et humanistes de la Gauche et trahi ses électeurs. Pour le brillant jeune banquier ministre, l’industrie se porterait mieux en appliquant aux salariés français les méthode de certains pays éloignés, quitte à modifier le code du travail selon les directives patronales et à supprimer les charges sociales qui protègent les salariés. Ce problème sera résolu par un impôt social qui absorbera l’ancienne CSG. On comprend également mieux la désinvolture du Président de la République qui se gausse des « sans dents » en parlant des pauvres, travailleurs ou privés d’emploi, qui survivent à la limite du quart monde. Il est navrant d’assister, sous un gouvernement socialiste, à l’abandon des idéaux qui rassemblaient le monde du travail. Huit syndicalistes qui avaient participé pendant sept années au combat pour leur emploi, contre la fermeture de l’usine GOODYEAR d’Amiens ont été condamnés à deux ans de prison ferme le 24 novembre 2015 sur réquisition du Parquet d’Amiens, malgré le retrait des plaintes avant le commencement de l’audience. Ces condamnations sonnent comme une menace adressée aux salariés par le Gouvernement, pour leur faire courber l’échine et accepter sans broncher les reculs sociaux qui se succèdent depuis l’arrivée du Président Hollande à l’Elysée. La condamnation de syndicalistes à de la prison ferme est une mesure inédite en France. Il est remarquable que ce soit sous la mandature de François Hollande et sur consignes du Gouvernement « socialiste » que le Parquet, en l’absence de plaintes, ait décidé de poursuivre et recommandé la condamnation. Le MEDEF se réjouit évidemment de ce jugement. La politique de François Hollande laisse une Gauche violentée et en colère. Le Front National ouvre les bras aux travailleurs salariés qui représentent la plus grande partie du peuple de Gauche, abandonnés par les socialistes au pouvoir. Pour les prochaines présidentielles, Marine Le Penn n’a pas à faire campagne, la triplette Hollande, Valls, Macron s’en chargent. Sur ce point ils font aussi bien que Sarkozy, Buisson et ses sbires. On ne voit plus ce qui ,peut empêcher un régime autoritaire et raciste d’accéder au pouvoir dans une France qui ressemble de plus en plus à celle de 1943 et du Gouvernement de Vichy.
Face à l’abandon des valeurs, la montée du populisme.
Comme dans les années 30 en Allemagne, la crise économique se conjugue avec une idéologie populiste pour amener un Parti raciste et xénophobe en position de gouverner, sans que les responsables politiques des Partis républicains traditionnels se remettent en question.
Comme sous le quinquennat précédent, les Droits de l’Homme sont balayés sous la moquette de l’Élysée. Les victimes de tortures dans leurs pays, sont de plus en plus nombreuses à se voir refuser l’asile politique en France. La jungle de Calais est un scandale humanitaire qui entache l’honneur de la Nation. Pour les lanceurs d’alerte, le signal adressé par la Présidence de la République en refusant l’asile à Julian Assange, le révélateur du wikilead, est on ne peut plus clair. Avant de révéler les indélicatesses des puissants, et particulièrement en France, il vaut mieux réfléchir à deux fois. La directrice de l’Institut national de la consommation, qui a aidé au développement du journal « 60 millions de consommateurs » peu prisé du patronat français, a été limogée pour sa position favorable aux consommateurs que sont les citoyens de notre république en trompe-l’œil. En France, une mère de famille sans ressources peut se retrouver en prison pour avoir tenté de subtiliser un morceau de viande à l’étal d’un super marché, mais un industriel faisant courir un grave risque sanitaire à la population ne doit pas être inquiété. L’amiante, la viande de la « vache folle », la production agricole polluée par les produits phytosanitaires toxiques ou par les retombées de Tchernobyl, le sang contaminé au début du sida et récemment les victimes du laboratoire pharmaceutique Servier, sont des épisodes qui résonnent encore douloureusement. Cela en pure perte car les industriels indélicats se retranchent derrière la fumeuse loi « Fauchon » votée pendant l’ère Chirac, qui impose que la preuve de la volonté de tuer soit faite pour leur en faire grief. Ils disposent également d’énormes moyens financiers, pour opposer aux études scientifiques qui démontrent les risques de leurs productions, d’autres études contradictoires commandées à une batterie de « scientifiques » inféodés. C’est ainsi que nous avons parfois vu apparaître, des études prouvant l’innocuité du tabac, de l’amiante, des pesticides, des organismes génétiquement modifiés, du bisphénol A etc… Les ministères de l’emploi et de l’industrie, comme celui de la santé publique regardent ailleurs. Et pourtant, après un siècle de laxisme administratif, le nombre des victimes de l’amiante s’élevait à deux mille décès par an au moment de son interdiction. Les prévisionnistes envisageaient 150. 000 morts supplémentaires au cours des vingt années suivantes. Ces « bavures » sanitaires relèvent-elles de la forfaiture des responsables politiques et de celle des hauts fonctionnaires en charge des services de l’Etat, ou sommes-nous entre les mains d’une coterie de jean-foutres, qui à Gauche comme à Droite ne se soucient que de leurs propres intérêts immédiats. Le scandale de la nasse de Calais qui piège les migrants de tous bords dans une sorte de bourbier sordide et crée insécurité et exaspération dans la région, donne une première réponse. Par contre l’Etat est très réactif pour réduire les libertés publiques. C’est encore au Parti socialiste qu’est revenu la palme, avec l’état d’urgence décrété dans la confusion et l’imbroglio de la déchéance de nationalité, objectivement réservée aux seuls binationaux de confession musulmane, avant de le graver dans le marbre de la constitution. L’intervention du Conseil national des barreaux qui dénonce le nouveau régime juridique et social qui rompt durablement avec les principes républicains et les mises en garde du Conseil de l’Europe et de la Cour européenne des Droits de l’homme qui s’inquiètent de voir les libertés publiques mises à mal, n’auront pas ému le petit couple Hollande/Valls, sur la pertinence d’une disposition taillée sur mesure pour la plus grande joie du Front National.
Pas mieux pour la Droite républicaine.
Cette attitude de l’Etat, qui remise l’éthique au rayon des accessoires inutiles, est partagée par tous les Partis de gouvernement qui se succèdent au rythme de l’alternance politique. Le Président Sarkozy, issu des rangs de l’UMP, a exprimé sa gratitude au Président du groupe pharmaceutique Servier responsable de plus d’un millier de morts, en plein scandale du Médiator, en l’élevant au rang de Grand-Croix dans l’Ordre de la Légion d’honneur. Il a également eu l’occasion de remercier le dictateur Kadafi en le recevant à Paris pour assister aux cérémonies du 14 juillet et en l’autorisant à planter sa tente de bédouin sur la pelouse de la capitale. Ce qui a motivé cette marque d’amitié envers le dictateur reste mystérieux, même si des rumeurs insistantes concernant le financement de la campagne présidentielle se sont répandues dans la presse. Sur ce point, on comprend mieux l’acharnement de la Présidence à réduire l’hypothétique et sulfureux bailleur de fond à un silence définitif. Le bilan global de ce petit pas de deux, au niveau de l’éthique républicaine, est loin d’être positif, au point de vouloir effacer l’ardoise dans la mémoire de l’électorat en changeant le nom du parti UMP en « Les Républicains ».
Les querelles au sein des Partis politiques nous montrent à l’évidence, que ce qui motive nos élites politiques concerne d’abord leurs déroulements de carrière pour accéder au sommet de la pyramide, là où se trouvent concentrées la manne financière et les relations profitables. Les Partis ont abandonné les projets de société pour s’adonner à la confrontation égotiste des premiers de cordée à la tête des écuries politiciennes. Ces opportunistes, qu’ils soient de droite ou de gauche, courtisent financiers et grands capitaines d’industrie pour alimenter leurs ressources financières en vue des campagnes électorales à venir. L’extrême droite de la famille Le Penn, en délicatesse avec l’humanisme et les droits de la personne humaine, s’est adressée à Poutine, le nouveau tsar Russe qui fait assassiner ses opposants, afin d’obtenir de substantiels subsides pour organiser ses campagnes d’affichage. Les bailleurs de fond attendent un rapide retour sur investissement qui passe avant les intérêts du pays et des administrés. Avant le début de la Seconde Guerre mondiale, Hitler avait déjà ses partisans en France.
Un système bien ficelé.
Chaque année, le rapport de la Cour des Comptes nous montre l’irresponsabilité des élus et la gabegie qui plombent les finances publiques. Ces comportements nous amènent doucement mais surement sur la voie de la faillite. Alors, comme en Grèce, c’est le petit peuple qui paiera le redressement par des sacrifices sur les salaires, sur le niveau des retraites et sur la protection sociale, des secteurs sans importance pour les plus riches qui verront se creuser encore plus le fossé qui les sépare des réalités vécues par la population laborieuse. A qui profiteront ces mesures…aux groupes industriels qui, débarrassés des charges « sociales », trouveront sur place une main d’œuvre à bon marché, sans avoir les tracas d’une délocalisation. Sans vergogne, les élus continueront sans doute à se voter de substantielles indemnités, à s’auto-protéger des atteintes de la justice tout en concoctant des lois coercitives pour les travailleurs et à utiliser l’argent public pour alimenter leur clientélisme. La fréquence des mésaventures d’hommes politiques confrontés à la justice explique sans doute le peu d’empressement des gouvernements pour donner à l’institution judiciaire les moyens de fonctionner normalement. Au début de l’année 2016, la justice en est encore à réclamer, sans succès, le comblement de ses sous effectifs et le remplacement de matériels usagés ou défectueux. Pour les dossiers impliquant des responsables politiques et de grandes entreprises, la procédure peut atteindre trente ans, avant de se terminer par une relaxe générale. La CEDH condamne régulièrement la France pour son système judiciaire et la longueur des instructions qui permet aux voyous de la République, vieux chevaux de retour, de mourir avant que les affaires les concernant soit jugées. Nicolas Sarkozy est le champion toutes catégories des adversaires de la justice pour ses attaques régulières et sa tentative de supprimer les juges d’instruction quand il était Président de la République. Hollande tient les juges du Parquet à l’écart, pour permettre aux policiers de ne ne pas les craindre en cas de bavure pendant l’état d’urgence qu’il s’évertue à faire passer dans la constitution. Ce ne sont pas les agitations épisodiques que l’Assemblée donne à voir les jours de retransmission télévisuelles qui y changeront quelque chose. Les élus qui voudraient assumer en conscience leurs rôles de représentants du peuple sont rapidement mis au pas dans un système de gouvernance organisé par un pouvoir financier moins officiel mais plus influent.
…Alors, pour les jean-foutres du sommet, coupables de forfaiture, les aspirations et le bien-être des citoyens de la base ?… pfff !
Kan ar Peulvan août 2015
Dernière mise à jour le 30 janvier 2016
Voir: Les scandales de la République par Jean Garrigues éd. Robert Laffont 2004